On a analysé les comptes annuels 2020 de la filiale belge de Facebook. Et on est loin de l’équité fiscale annoncée…
Facebook Belgique va payer 681.573 euros à titre d’impôts pour l’année fiscale 2020.
Ce montant, en baisse de 42% par rapport à l’exercice 2019, est mentionné dans les comptes annuels de Facebook Belgium, déposés le 21 juin dernier et accessibles sur le site de la Centrale des bilans de la Banque nationale de Belgique.
Une marge opérationnelle belge étonnante
Officiellement toujours, le bénéfice avant impôts de Facebook en Belgique a atteint l’an dernier 2,62 millions d’euros, soit une marge opérationnelle de… 3,46%, alors qu’au niveau mondial le groupe créé et dirigé par Mark Zuckerberg a dépassé les 38% sur le même exercice.
Autrement dit, si la filiale belge de Facebook et ses quelque 25 salarié.e.s affichaient la même performance opérationnelle que le groupe, elle aurait enregistré un bénéfice avant impôts de 28,74 millions d’euros en 2020, sur un chiffre d’affaires de 75,63 millions d’euros (-14%).
Sans même remettre en cause la hauteur de ses revenus locaux, cela aurait amené la filiale belge à verser environ 7,47 millions d’euros en impôts à l’Etat. Soit près de 11 fois plus que les 0,68 million d’euros effectivement mentionnés dans les comptes annuels !
Facebook : du discours à la réalité
Fin 2017, déjà dans le collimateur des autorités européennes de la concurrence depuis un bon moment, Facebook avait pourtant annoncé mettre un terme à son optimisation fiscale, qui consiste, depuis 2010, à rapatrier ses rentrées européennes en Irlande, pour bénéficier d’un taux d’imposition très favorable (12,5% actuellement).
« Le chiffre d’affaires publicitaire généré par nos équipes locales ne sera plus enregistré par notre siège social à Dublin, mais le sera par la société locale du pays en question, avait alors écrit le directeur financier de Facebook, Dave Wehner. (…) Nous pensons que ce transfert vers une structure de vente locale permettra plus de transparence. »
Ce changement devait être achevé « au premier semestre 2018 »…
Impôts de 15% via l’OCDE… en 2023 ?
Plus récemment, en février 2020, Mark Zuckerberg himself avait « souhaité une réforme fiscale » et s’était dit « heureux que l’OCDE se penche sur la question ».
Il avait même ajouté : « Nous souhaitons que le processus aboutisse pour que nous ayons un système stable et fiable pour l’avenir. Et nous acceptons que cela puisse nous mener à payer plus d’impôts et à les payer dans différents pays ». (…) Nous comprenons la frustration quant à la façon dont les entreprises technologiques sont taxées en Europe ».
Enfin, il y a quelques jours, début juillet 2021, 130 des 139 pays membres de l’OCDE se sont accordés sur un impôt minimal de 15% sur les bénéfices des multinationales. En espérant aboutir à une mise en oeuvre « en 2023 ». Mais 9 pays résistent. Dont la Hongrie, l’Estonie et, bien entendu, l’Irlande.
29 milliards de dollars de bénéfice net en 2020
Facebook compte actuellement environ 7 millions d’utilisateurs actifs en Belgique sur sa plateforme-phare. Une communauté vieillissante à laquelle il faut ajouter les 4,5 millions d’utilisateurs d’Instagram. Sans parler des messageries maison, Messenger et WhatsApp, encore plus populaires depuis le 1er confinement elles aussi.
Au niveau mondial, Facebook comptait 3,8 milliards d’utilisateurs actifs à travers le monde fin 2020, toutes plateformes confondues. Son bénéfice net s’est élevé à 29,15 milliards de dollars (+58%), sur un chiffre d’affaires annuel de 84,17 milliards de dollars (+21%). Largement de quoi assumer ses responsabilités fiscales, non ?
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